Les datacenters et le développement durable

L’invisible pollue. En 2022, une étude a révélé que le numérique a un impact environnemental significatif. La multiplication des appareils technologiques au cours des dernières années a entraîné une augmentation de la quantité de données, lesquelles sont stockées dans des centres de données. Malheureusement, ces infrastructures sont extrêmement énergivores.

 

Qu’est-ce qu’un datacenter ?

Un datacenter, ou centre de données en français, est une infrastructure physique qui stocke, héberge, traite et partage de grands volumes de données numériques provenant de nos appareils et de nos opérations digitales quotidiennes, telles que les paiements en ligne et les e-mails. Les datacenters sont aujourd’hui indispensables : sans eux, il serait impossible de sauvegarder des photos sur le cloud, d’effectuer une recherche sur Internet ou même d’enregistrer les mots de passe.

Ces espaces disposent de nombreux équipements, tels que des ordinateurs, serveurs, routeurs, disques durs, baies de stockage, kilomètres de câbles et systèmes de sécurité… une quantité impressionnante de matériel regroupée dans un même espace. Les centres de données fonctionnent 24h/24, 7j/7, car l’activité numérique ne s’arrête jamais. Pour assurer le bon fonctionnement des équipements, il est impératif de maintenir l’air ambiant à une température de 20°C.

Avec le développement rapide de l’intelligence artificielle, le nombre de centres de données ne cesse d’augmenter. L’intelligence artificielle est particulièrement énergivore : elle nécessite la collecte et le tri des données, l’entraînement de modèles (la phase la plus énergivore), et enfin, l’exécution des opérations finales.

Internet, bien que virtuel, dépend donc d’espaces physiques comme les datacenters pour fonctionner.

Impact environnemental des datacenters

Le numérique a un impact non négligeable sur l’environnement en raison de sa consommation continue d’électricité.

Quelques chiffres :

  • À l’échelle mondiale, les datacenters consomment 2% de l’électricité mondiale. Selon une étude de Huawei Technologies, ce chiffre pourrait atteindre 13% d’ici 2030.
  • Ils génèrent 0,3% des gaz à effet de serre.
  • Deux tiers des datacenters en Chine utilisent des énergies fossiles.
  • 77% des serveurs sont suréquipés.
  • On dénombre environ 500 grands datacenters dans le monde, dont les plus importants appartiennent aux GAFAM.
  • Il y a 4 798 centres de données répartis dans 122 pays.

En France :

  • 149 datacenters, dont 40% en Île-de-France.
  • L’empreinte carbone des datacenters représente 14%.

Pourquoi les datascenters sont-ils considérés comme polluant ?

La principale source de pollution est la consommation électrique. Les serveurs des datacenters fonctionnent en continu sans mode veille. La climatisation doit également fonctionner en continu pour maintenir l’air ambiant à 20°C. Ces centres de données convertissent l’énergie électrique en énergie thermique, rendant la climatisation essentielle. Le refroidissement des espaces utilise beaucoup d’électricité ainsi qu’une quantité importante d’eau et de substances chimiques polluantes. L’eau utilisée pour le refroidissement est souvent rejetée dans les égouts, ce qui contribue à l’impact environnemental. Par exemple, un datacenter utilise la même quantité d’eau que 3 hôpitaux sur une année ou 6,5 piscines olympiques. La chaleur produite est souvent gaspillée et rejetée dans l’atmosphère.

Une autre source de pollution provient des équipements utilisés. Ces derniers sont fabriqués à partir de divers composants, dont des métaux rares comme le cobalt. Ces matériaux ne peuvent actuellement ni être remplacés ni réutilisés et sont extraits dans des régions défavorisées où les conditions de travail sont difficiles. Les méthodes d’extraction de ces métaux ont un impact environnemental significatif sur l’air, les eaux souterraines, les forêts, la biodiversité et les sols.

De plus, le matériel fonctionne constamment et réalise souvent des tâches inutiles, entraînant un gaspillage superflu d’énergie. Une enquête réalisée par ControlUp révèle que 77% des datacenters sont suréquipés, avec du matériel non nécessaire en fonctionnement continu, ce qui engendre une production de chaleur supplémentaire et une consommation d’énergie accrue.

Enfin, toute construction de bâtiment entraîne diverses pollutions, telles que des émissions de gaz à effet de serre, l’utilisation d’énergies et la modification des écosystèmes.

Comment diminuer l’empreinte carbone des datacenters ?

1. Réduction de la consommation d’énergie

Il est possible d’alimenter ces centres avec de l’électricité produite exclusivement à partir d’énergies renouvelables. Le plus grand centre de données des États-Unis a adopté cette option et utilise uniquement de l’énergie verte. Cette approche est également suivie par les datacenters Ikoula et PlanetHoster en France, qui utilisent de l’électricité provenant à 100% d’énergies renouvelables.

En Europe, l’objectif de neutralité carbone est fixé pour 2030.

2. Amélioration des systèmes de refroidissement

Plusieurs solutions existent :

  • Le « couloir froid » : réorganiser les centres pour que tous les serveurs absorbent l’air froid d’un côté et rejettent l’air chaud de l’autre, créant ainsi un couloir d’air froid et un couloir d’air chaud.
  • Le « free cooling » : délocaliser les datacenters dans des pays froids ou en altitude pour utiliser l’air frais extérieur pour refroidir les salles.
  • Les bains de liquides diélectriques : immerger les serveurs dans des bains d’huile usagée de vidange ou de cuisine. L’huile, non corrosive et non conductrice, peut absorber jusqu’à 1500 fois plus de chaleur que l’air, réduisant ainsi la consommation d’énergie pour le refroidissement des datacenters de 80%.

Une solution innovante en cours : la valorisation de la chaleur produite par les équipements. Cette chaleur pourrait être utilisée pour chauffer d’autres bâtiments ou produire de l’eau chaude. La société Infomaniak (hébergeur du forum-nas.fr), basée en Suisse, construit un nouveau datacenter qui chauffera les 6 000 foyers d’un écoquartier à l’année. La chaleur produite sera acheminée vers le système de chauffage urbain de Genève à l’automne 2024.

Il est important que chacun agisse de manière éco-responsable. Ces centres de données n’hébergent pas que nos images et fichiers, mais il est de notre responsabilité de réduire la quantité de données en triant nos boîtes mail, en stockant sur le cloud ou le drive uniquement les documents nécessaires ou en optant pour un centre d’hébergement écologique.

Enfin, la gestion de fin de vie des appareils contribue également à l’empreinte carbone, avec la génération de millions de tonnes de déchets électroniques chaque année. Par exemple, Infomaniak affirme qu’au lieu de remplacer ses serveurs par des neufs, il préfère les mettre à jour avec des pièces de seconde main issues de l’économie circulaire. En utilisant des technologies de partage et le cloud computing, il est possible d’étendre la durée de vie des serveurs jusqu’à 15 ans tout en garantissant fiabilité et performances de premier ordre.

Numérique / Version physique

L’agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie a réalisé une étude en 2022 sur le coût environnemental de la numérisation des services culturels. L’essentiel réside dans la fréquence d’utilisation. Si vous lisez plus d’une dizaine de romans par an, il serait préférable d’investir dans une liseuse numérique. Quant au CD et DVD, tout est une question de durée : s’il est conservé des dizaines d’années ou utilisé dans le cadre de locations ou de prêts, il peut être plus écologique que la version numérique.

Diminuer son empreinte carbone ?

Quelques recommandations :

  • Préférez l’utilisation du Wi-Fi plutôt que du réseau mobile.
  • Téléchargez les contenus plutôt que de regarder des vidéos en ligne.
  • Adaptez la résolution des vidéos à votre équipement.

Voici quelques comparaisons d’empreinte carbone (les chiffres sont illustratifs et peuvent varier) :

  • 7h de vidéo en basse définition et en Wi-Fi = 20 km en voiture.
  • 7h de vidéo en haute définition et en 4G = 133 km en voiture.

Conclusion

Ce qui est invisible peut également polluer, comme le démontre le numérique. Pour réduire l’empreinte carbone, il est crucial d’adopter des pratiques plus durables : utiliser des énergies renouvelables, diminuer la consommation énergétique et développer le recyclage des matériaux rares. Ensemble, nous pouvons minimiser l’impact environnemental du numérique. Adopter des habitudes numériques plus vertes est essentiel pour un avenir durable.

Le numérique n’est pas simplement une série de chiffres et de bilans (comptable). C’est un domaine riche et complexe qui mérite une réflexion approfondie sur ses multiples facettes.

Le numérique offre plusieurs avantages importants pour l’environnement et l’efficacité des entreprises. Premièrement, il permet une réduction significative des déplacements professionnels grâce aux outils de communication et de collaboration en ligne. Cela diminue non seulement les émissions de carbone liées aux transports, mais aussi les coûts et le temps associés aux voyages.

Deuxièmement, le numérique joue un rôle clé dans la réduction de la consommation de papier. Les documents électroniques, les factures numériques et les signatures électroniques diminuent la dépendance au papier, ce qui permet de préserver les ressources forestières et de réduire les déchets.

En outre, la numérisation facilite la gestion et le stockage des données, ce qui permet un accès plus rapide et plus efficace aux informations nécessaires. Cette amélioration de l’efficacité opérationnelle aide les entreprises à réduire le gaspillage de ressources et à optimiser leurs processus.

Par ailleurs, les outils numériques permettent une meilleure gestion des ressources énergétiques en optimisant les opérations et en réduisant le besoin de ressources physiques. Cela se traduit par une diminution de l’empreinte carbone globale des activités professionnelles.

Enfin, le numérique encourage l’innovation et la création de solutions durables, telles que les systèmes de gestion de l’énergie et les technologies de réduction des déchets, contribuant ainsi à un avenir plus écologique et plus responsable.

  1. Alors je vais me baser sur mon expérience, qui n’en fait donc pas une généralité. Mais j’aurais envie de dire, par rapport aux DC sur lesquels j’ai bossé, que non, l’eau n’est pas un souci (hormis que bon, c’est du béton, donc bon, ça consomme de l’eau lors de la construction). Mais une fois en service, non, la consommation d’eau est «négligeable». Les DC ne fonctionnent plus en eau perdue pour refroidir. Ce sont des circuits fermés. Alors oui, il peut y avoir des fuites, et oui, l’eau, pour la protéger contre le gel, peut contenir des produits chimiques. Mais non, les DC (en tout cas tout ceux qui sortent de terre maintenant, et depuis quelques années maintenant) n’ont pas de consommation d’eau élevée. Je rejoins l’article sur la consommation électrique, même si là aussi, pour le coup, le ratio data hébergée / consommation électrique s’est largement amélioré ces dernières années, justement par des choix matériel plus pertinent et une meilleure conception des salles data (les fameux couloirs, entre autre). Mais ça pompe quand même beaucoup. Enfin, oui, le rejet de chaleur est un souci. Il y a bien Equinix à Saint-Denis qui, pour 1 de ces DC, utilise la chaleur rejetée pour réchauffer la piscine olympique et le futur quartier autour, mais ça reste à la marge. A date, la majorité des calories réchauffe les oiseaux. Après, oui, les opérateurs de DC ont conscience de ça, et quelques projets à venir commencent à être pensé autrement. Mais ça reste très énergivore, et ça pousse comme des petits pains, en même temps que nos «besoins» numériques.

  2. « 7h de vidéo en basse définition et en Wi-Fi = 20 km en voiture.
    7h de vidéo en haute définition et en 4G = 133 km en voiture. »

    Je suis curieux de connaître la source de ces chiffres

  3. Merci pour l article qui éclaire effectivement aussi sur l avenir avec la croissance exponentielle liée à l IA.
    Après est il difficile d utiliser la chaleur produite par les équipements pour générer du froid?
    Le principe de fonctionnement d une climatisation c est bien avec de la chaleur je produit du froid non?

    Effectivement privilégier les DC avec utilisation de l électricité verte ..,

    Remarques:
    1/ Si les Suisses réutilisent et réparent avec de l occasion s est bien la gestion de l obsolescence mais moins bien que d utiliser des serveurs dernier cri qui sont plus petit (et donc moins de surface à refroidir,plus puissant et consomment moins, non?
    2/ “
    Téléchargez les contenus plutôt que de regarder des vidéos en ligne.

    Si l on regarde qu une fois la vidéo: que l on la telecharge ou stream/visionnage je pense que cela consomme pareil non?

    En tout cas cela fait réfléchir et
    Donc encore un bon point pour nos NAS qui consomment moins
    , que l on peut arrêter la nuit et juste en augmentant la taille des disques durs l on peut faire perdurer ces derniers….
    Le DS1812+ fonctionne toujours et est recyclé en files server

    1. Concernant la climatisation, malheureusement non ce n’est pas avec la chaleur qu’on fait du froid. C’est en décomprimant le gaz. La chaleur est produite lors de la compression du gaz ( car il faut bien le re-comprimer après l’avoir décomprimé ) et doit également être évacuée.

  4. Merci pour cet article. Mais il n’y a pas que les Datacenters qui ont un impact environnemental. Selon plusieurs étude de l’ADEME, l’impact environnemental du numérique se réparti en 3 catégories :
    – Datacenters : environ 20% de l’impact
    – Réseau : environ 15% de l’impact
    – Terminaux : environ 65% de l’impact
    Dans cet impact, on comptabilise la fabrication, l’usage et le recyclage ou traitement des déchets.

    Le site https://www.greenit.fr/... dispose de pas mal de ressources sur ce sujet.

    Pour les bonnes pratiques, pour la TV, comme je regarde que des chaines de la TNT, du coup, j’utilise mon antenne râteau et j’éteins mon décodeur TV que je n’utilise que pour le replay.

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